Nr. 50/2022
Origine de l’information / Rectification

(X. c. «24heures»)

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I. En fait

A. Le 22 mars 2021, «24 heures» publie sur son site un article intitulé «Des mandats d’arrêts contre des activistes accusés de ‹terrorisme›». L’article est repris de l’Agence France Presse AFP et relate que le tribunal d’Alger a émis des mandats d’arrêt internationaux à l’encontre de quatre activistes établis à l’étranger, accusés notamment d’appartenir à un groupe terroriste. Parmi eux Mohamed Larbi Zeitout, un ancien diplomate résidant au Royaume-Uni. Zeitout serait le fondateur et un des principaux dirigeants du mouvement islamiste Rachad. Ce mouvement serait illégal en Algérie et regrouperait des anciens militants du Front islamique du salut FIS, dissout en mars 1992. Le mouvement Rachad est accusé d’essayer d’infiltrer et d’entrainer dans la violence le mouvement pro-démocratique Hirak. L’article cite un communiqué publié par l’agence officielle algérienne APS, selon lequel Zeitout serait poursuivi pour «gestion et financement d’un groupe terroriste ciblant la sécurité de l’État et l’unité nationale, faux et usage de faux et blanchiment d’argent dans le cadre d’une bande criminelle».

B. Le 8 avril 2021, X. saisit le Conseil suisse de la presse. Il estime que «24heures» a violé deux chiffres de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste» (ci-après «Déclaration»). Le chiffre 3 (omission d’informations essentielles) en «dénaturant» l’émission de mandats d’arrêts internationaux. Il s’agit de mandats contre des tiers auxquels le nom de l’association Rachad a été ajouté, sans qu’elle a été citée ni concernée dans les mandats. En outre, «24 heures» aurait violé le chiffre 5 (rectification) en ne réagissant pas à la sollicitation du plaignant de rectifier l’article en question.

C. Le 25 mai 2021, le rédacteur en chef de «24 heures», Claude Ansermoz, prend position et demande le rejet de la plainte. Concernant la violation alléguée du chiffre 3 de la «Déclaration», le rédacteur en chef considère que la plainte est en fait dirigée contre une dépêche de l’AFP. Son journal ne serait concerné que «par ricochet». Il fait valoir que les journalistes peuvent se prévaloir de l’exactitude du contenu envoyé par les agences de presse reconnues et n’ont pas à vérifier ces informations par leurs recherches propres. L’origine de l’article repris est clairement indiquée.

Concernant la violation alléguée du chiffre 5 de la «Déclaration», le rédacteur en chef fait valoir que le plaignant n’a jamais pris contact avec la rédaction pour demander une rectification avant le dépôt de la plainte auprès du Conseil suisse de la presse. En outre les informations litigieuses – le qualificatif «islamiste» et l’information selon laquelle le mouvement Rachad serait interdit en Algérie – sont confirmées par les journalistes du «Temps» dans un article dédié au mouvement paru le 6 mai 2021.

D. Selon l’art. 13 al. 1 e du Règlement du Conseil suisse la presse, la présidence traite les plaintes qui, dans leurs éléments essentiels, concordent avec des cas déjà traités par le Conseil ou qui revêtent une importance mineure. Le plaignant en a été informé le 22 octobre 2021.

F. La présidence du Conseil suisse de la presse, composée de Susan Boos (présidente), Annik Dubied (vice-présidente) et Jan Grüebler (vice-président) et Ursina Wey (directrice), a traité la présente prise de position le 30 décembre 2022 par voie de correspondance.

II. Considérants

1. Pour ce qui est du chiffre 3 (omission d’informations essentielles) de la «Déclaration», le Conseil de la presse estime qu’il n’est pas violé. Comme soutenu dans la prise de position 3/1992 on ne peut reprocher à un journaliste de n’avoir pas examiné de manière critique une dépêche d’agence du fait qu’un journaliste ne manque pas à son devoir de vigilance s’il ne procède pas au contrôle de la conformité entre une dépêche et la réalité.

2. Pour le Conseil de la presse, le chiffre 5 de la «Déclaration» n’est pas violé non plus. En l’absence de preuve, il faut laisser ouverte la question de savoir si une rectification a été demandée à la rédaction comme le soutient le plaignant. «24heures» nie avoir reçu des emails.

III. Conclusions

1. La plainte est rejetée.

2. En publiant l’article «Des mandats d’arrêts contre des activistes accusés de ‹terrorisme›», «24 heures» n’a pas violé les chiffres 3 (omission d’informations essentielles) et 5 (rectification) de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste».