Nr. 19/2006
Caricature du défunt pape

(X. c. «Le Temps») Prise de position du Conseil suisse de la presse du 13 avril 2006

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I. En Fait

A. Le 5 avril 2005, «Le Temps» a publié un dessin de Chappatte montrant la dépouille du Pape Jean Paul II sous un crucifix. A côté, on voit une foule de fidèles, certains munis de caméras, qui se recueillent devant le défunt pape. Jésus crucifié s’adresse aux fidèles: «ça ne vous dérange pas que j’existe?»

B. Par courrier des 11 et 28 avril 2005, X. s’est adressé au Conseil de la presse pour se plaindre de ce dessin qui insulterait les Chrétiens et les gens cultivés. Il demande: «Les dessinateurs échapperaient-ils à la déontologie requise dans la profession que vous représentez? (…) Si nos cousins juifs et musulmans avaient été ainsi attaqués, c’est une plainte pénale – pour racisme – qui aurait été déposée.»

C. Conformément à l’art. 9 al. 3 du règlement du Conseil suisse de la presse, la présidence doit refuser des plaintes manifestement infondées.

D. La présidence du Conseil suisse de la presse composée par Peter Studer (président), et Esther Diener-Morscher (vice-présidente) a liquidé la présente prise de position le 13 avril 2006 par voie de correspondance. Sylvie Arsever, rédactrice du «Temps», s’est récusée spontanément.

II. Considérants

1. X. se plaint d’une violation du chiffre 8 de la «Déclaration». Mais il ne motive pas, dans quelle mesure l’illustration critiquée du «Temps» du 5 avril 2005 aurait violé l’interdiction des discriminations. Il n’appartient pas au Conseil de la presse de rechercher des motifs pour d’éventuelles violations des normes déontologiques à la place du plaignant (prises de position 56/2003, 39/2004).

2. En général, la liberté de la satire et de la caricature vaut aussi pour les thèmes religieux. Elle n’est pas limitée par les interdits religieux, notamment celui de représenter certains objets ou personnages, et elle n’a pas à prendre en compte la sensibilité particulière des milieux les plus orthodoxes. Elle s’exerce dans un cadre fixé par le principe de proportionnalité et doit respecter, dans un esprit démocratique, l’interdiction de la discrimination, la vérité et la dignité humaine (prise de position 12/2006). Les limites de la liberté du commentaire ne sont manifestement pas dépassées si un journal pose la question légitime de la proportionnalité de l’intérêt public et médiatique immense autour du (défunt) pape. L’appréciation sur laquelle repose la caricature de Chappatte de même que son fondement factuel est reconnaissable pour le public (16/1999, 2/2000).

III. Conclusion

La plainte est rejetée comme manifestement infondée.