Nr. 37/2008
Devoir d’information / Lettre de lecteur

(X c. «24 Heures») Prise de position du Conseil suisse de la presse du 19 septembre 2008

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I. En fait

A. Par courrier du 21 septembre 2007, X. s’est adressé au Courrier des lecteurs de «24 Heures». Elle indique, que «depuis mars 2007, plusieurs quotidiens se sont à moult reprises fait l’écho d’une affaire concernant l’entreprise Nestlé (…) Suite a une plainte pour harcèlement psychologique, Nestlé a signé fin août 20007 un accord portant sur le paiement d’une indemnité de plusieurs centaines de milliers de francs à un ancien cadre licencié en 1998 (…) Dans ce contexte, et vu que le siège de Nestlé est dans le canton de Vaud, il est pour le moins surprenant que ‹24 Heures› n’ait publié aucun article relatif à cette affaire (…) Il ne reste au lecteur/trice averti/e des quotidiens romands qu’à s’interroger sur les raisons d’une telle connivence pouvant pousser la rédaction de ‹24 Heures› à un tel choix d’autocensure, au mépris de sa mission d’information».

B. Le 13 novembre 2007, Thierry Meyer, rédacteur en chef de ‹24 Heures›, a répondu: «Nous avons eu vent de cette affaire avant que la démarche juridique n’aboutisse. Nos contacts ne nous ont pas permis de développer un matériel suffisamment étayé pour publier un article. Et lorsque l’accord à l’amiable a abouti, un informateur a choisi son média pour en faire part: il ne s’agissait pas de ‹24 Heures›, mais du ‹Temps›. Nous avons sans doute effectué un travail insuffisant, des choix malheureux, mais en aucun cas cédé à de quelconques pressions. Il est totalement faux, voire injurieux de penser que nous procédons à ‹une autocensure qui méprise notre mission d’information› (…) Il est donc absolument exclu que nous laissions paraître vos propos, qui ne correspondent en rien à la réalité.»

C. Par courrier du 16 novembre 2007, X. s’est adressé au Conseil suisse de la presse. Selon le plaignante, «‹24 Heures› a gravement violé son obligation d’informer le public de l’affaire de mobbing chez Nestlé, devoir qui doit primer sur la responsabilité qu’a la presse à l’égard de tiers, pouvoirs publics et employeurs notamment (voir le préambule de la ‹Déclaration des devoirs et des droits du / de la journaliste›). D’une part, il a violé ses devoirs en ne publiant pas une seule ligne sur une affaire importante (…) D’autre part, (…) en refusant de publier ma lettre du 21 septembre 2007, qui aurait eu l’avantage d’enfin informer les lecteurs et lectrices du ‹24 Heures› de l’existence de ce conflit et de l’issue que celui-ci a trouvé. Partant, par ce double refus d’information, j’estime que ‹24 Heures› a violé les points 1, 2, 3 et 5 de la ‹Déclaration des devoirs›. Je me pose également la question de savoir si ‹24 Heures› a violé le point 9 (avoir accepté un avantage ou une promesse), même s’il est évident que ce fait ne peut être prouvé.»

D. Selon l’art 12 alinéa 1 du règlement du Conseil suisse la presse la présidence traite les plaintes sur lesquelles le Conseil n’entre pas en matière (art. 10).

E. La présidence du Conseil suisse de la presse composée par Dominique von Burg (président), Esther Diener-Morscher (vice-présidente) et Edy Salmina (vice-président) a traité la présente prise de position le 19 septembre 2008 par voie de correspondance.

II. Considérants

1. Selon l’art. 10 alinéa 1 du règlement du Conseil suisse de la presse le Conseil n’entre pas en matière sur une plainte si celle-ci est manifestent infondée.

2. Il ne découle de la «Déclaration» aucune obligation à rendre compte de manière objective. Ainsi, le Conseil a statué constamment, que le libre choix des informations qui sont publieés constitue un partie essentielle du travail journalistique et de la liberté de l’information (prise de position 2/2004). Dès lors, les journalistes ne sont pas tenus de rendre compte d’un événement particulier (37/2005). Même si le rédacteur en chef admet en l’occurrence que sa rédaction n’a pas bien travaillé sur ce sujet et même si la plupart des autres quotidiens romands en ont rendu compte plusieurs fois, «24 Heures» n’a donc pas violé des normes déontologique en ne traitant pas cette affaire dans ses colonnes.

3. De même, le Conseil suisse de la presse a régulièrement souligné que la publication des lettres de lecteurs relève de la liberté rédactionnelle. Cela signifie qu’un lecteur ne peut revendiquer un droit individuel à une publication (voir le plus récemment les prises de position 39 et 40/2007). Du point de vue de la déontologie, «24 Heures» était donc libre de publier ou non la lettre de la plaignante. Il ne relève pas de la compétence du Conseil suisse de la presse de contrôler le choix des textes et des lettres de lecteurs publiés par un média.

4. Concernant l’hypothèse de la plaignante, selon laquelle le journal pourrait éventuellement avoir violé le chiffre 9 de la Déclaration (indépendance), le Conseil de la presse souligne qu’il n’entre pas en matière si un grief ne repose que sur des suppositions vagues.

III. Conclusion

Le Conseil suisse de la presse n’entre pas en matière.