Zusammenfassung
Eine Zeitung darf eine durch die öffentliche Verwaltung verfasste Beilage veröffentlichen. Aber sie muss darauf achten, dass der Leser den Inhalt dieser Beilage klar vom redaktionellen Teil unterscheiden kann.
Nach der Veröffentlichung einer Beilage zum Thema Unternehmenssteuerrechtsreform durch die Waadtländer Zeitung «24heures» hat der Presserat auf Vorschlag eines seiner Mitglieder diesen Fall von sich aus aufgegriffen. Auf der ersten Seite ist rechts festgehalten, dass diese Beilage durch die kantonale Steuerverwaltung ausgearbeitet wurde. Indessen stiften andere Elemente Verwirrung. Auf der Frontseite ist eine Zeichnung des Karikaturisten der Zeitung abgebildet, das Editorial ist vom Chefredaktor von «24heures» verfasst und im Impressum ist dieser ebenfalls erwähnt als Chefredaktor der Beilage.
Für den Presserat ist eine solche Vermischung nicht zulässig. Hingegen anerkennt er das Recht der Zeitung, eine solche Beilage zu veröffentlichen, auch wenn diese einseitig ist und den Gegnern der Reform kein Raum zugestanden wird.
Résumé
Un quotidien peut publier un supplément rédigé par une administration publique. Mais il doit veiller à ce qu’aux yeux du lecteur, ce contenu soit clairement séparé du contenu rédactionnel.
Sur proposition d’un de ses membres, le Conseil de la presse s’autosaisit suite à la publication, par le quotidien vaudois «24heures», d’un supplément fiscal consacré à la réforme de la fiscalité des entreprises. En première page à droite, il est indiqué que ce supplément est réalisé par l’Administration cantonale des impôts. Toutefois d’autres éléments introduisent la confusion. La «Une», porte une caricature du dessinateur du journal, l’éditorial est signé du rédacteur en chef de «24heures», et dans l’impressum ce dernier est également mentionné comme rédacteur en chef du supplément.
Pour le Conseil de la presse, une telle confusion n’est pas admissible. En revanche, il reconnaît au quotidien le droit de publier un tel supplément, même s’il est unilatéral et qu’aucune surface n’est attribuée aux adversaires du projet.
Riassunto
Un giornale può certamente pubblicare un inserto realizzato da una pubblica amministrazione, ma agli occhi del lettore tale contributo deve chiaramente distinguersi dalla parte redazionale.
Il Consiglio della stampa si è occupato del caso in seguito alla pubblicazione, da parte del quotidiano vodese «24heures», di un supplemento sulla riforma della fiscalità delle imprese. In prima pagina, a destra, si legge chiaramente che si tratta di un contributo dell’Amministrazione fiscale. Altri elementi, invece, inducono a confusione. Sempre in prima pagina appare una vignetta disegnata dal caricaturista del giornale; inoltre, il direttore del giornale, che firma l’editoriale, figura anche come responsabile dell’inserto nell’impressum del medesimo.
Confusione inammissibile: è la conclusione del Consiglio della stampa, il quale però non contesta al giornale di aver pubblicato il supplemento, anche se di parte e non confrontato alle critiche degli avversari del progetto.
I. En fait
A. Le 14 mars 2015, le quotidien «24heures» publie un cahier intitulé «Taux unique, la révolution fiscale», distribué avec son édition du week-end du 14 et 15 mars. Ce cahier se présente comme un supplément de «24heures», avec le logo du quotidien et une caricature du dessinateur habituel du journal, avec un encadré mentionnant qu’il s’agit d’un «supplément fiscal», «réalisé par l’Administration cantonale des impôts». Le cahier porte sur la future réforme de l’imposition des entreprises III et comprend un éditorial signé par le rédacteur en chef de «24heures», Thierry Meyer, et neuf textes sous la forme d’articles, dont la rédaction a été assurée par trois collaborateurs de l’Etat de Vaud. En dernière page, l’impressum mentionne Thierry Meyer comme rédacteur en chef. En page 2, l’éditorial du rédacteur en chef introduit le fascicule et plaide pour le maintien de l’attractivité de la Suisse («Et pour conserver des emplois, la vue sur le lac et les montagnes, c’est bien, mais ça ne suffit pas»). Sur la même page est présenté un premier texte, sous la forme d’une interview de Marinette Kellenberger, à la tête de la Direction générale de la fiscalité du canton de Vaud. Suivent une présentation de la réforme signée par le conseiller d’Etat vaudois en charge des Finances Pascal Broulis à la page 3 et un récapitulatif des enjeux en pages 4 et 5. Aux pages suivantes se trouvent une interview d’Eveline Widmer-Schlumpf, conseillère fédérale en charge des Finances (page 6), un texte sur les entreprises qui bénéficient d’un statut fiscal particulier sur l’arc lémanique (page 7), une double-page sur les soutiens à la réforme (pages 8–9), un texte sur le budget vaudois pour 2015 (page 10), suivi de deux pages (11 et 12) sur le produit de l’impôt et les tâches publiques. A l’exception de l’éditorial et de deux articles, les textes du cahier ne sont pas signés.
B. Le 23 mars 2015, Michel Zendali, membre du Conseil suisse de la presse, demande l’autosaisie du Conseil suisse de la presse, considérant que le cahier publié par «24heures» les 14 et 15 mars 2015 trompe le lecteur de plusieurs manières. D’une part, pour Michel Zendali, il y a confusion entre information et propagande politique, aucun point de vue opposé à la réforme n’étant relayé. D’autre part, il y a pour lui ambiguïté sur la responsabilité du contenu du cahier, la mention de l’Etat de Vaud étant discrète, les articles n’étant pas signés en bas de page, à l’exception de celui de Pascal Broulis, de l’éditorial de Thierry Meyer et des photos de Patrick Martin. («Le contenu de ce supplément que tout lecteur prend pour de l’information est en fait un exercice de propagande unilatéral (…) qui se présente sous une apparence d’information mais qui est en fait un exercice de propagande politique» (mail de M. Zendali, 23.03.15). Le non-respect de ces articles et directives est «susceptible de générer une ambigüité sur la responsabilité du contenu de ce supplément», selon Michel Zendali dans le même mail.
C. La majorité du Conseil suisse de la presse décide de s’autosaisir du cas du supplément fiscal et en informe «24heures» le 20 mai 2015, demandant par conséquent au rédacteur en chef du quotidien de présenter sa position.
D. Le 18 juin 2015, le quotidien «24heures», par la voix de Thierry Meyer, son rédacteur en chef, conteste l’autosaisie dans son intégralité. Thierry Meyer estime en préambule que le courriel de Michel Zendali ne contient aucune référence à une violation d’un article de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste» ou des directives qui s’y rapportent, contrairement à ce qui est demandé par le Règlement du Conseil suisse de la presse au sujet des plaintes. Renonçant à requérir ce qu’il considère être la stricte application du règlement, «24heures» soulève ensuite quatre points.
Le quotidien rappelle d’abord que «24heures» publie chaque année depuis 2005 un supplément fiscal réalisé par l’Administration fiscale vaudoise. La rédaction du quotidien relit le fascicule, ce qui explique la présence du logo de «24heures» selon Thierry Meyer. Pour le quotidien, le contenu du supplément vise par ailleurs à présenter «de manière objective et factuelle» la réforme de l’imposition des entreprises III.
Quant à une éventuelle violation de l’article 1 de la «Déclaration» énonçant le devoir de recherche de la vérité, «24heures» estime que le supplément fiscal renseigne les lecteurs sans influencer leur opinion, grâce au principal acteur de la réforme, l’Administration fiscale. Le quotidien fait remarquer qu’un compte-rendu unilatéral de la part d’un média est admissible.
Quant à une éventuelle violation de l’article 2 de la «Déclaration» portant sur le devoir de défendre la liberté d’information et de l’article 2.3 des directives s’y rapportant, le quotidien explique que la publication du supplément n’exerce aucune influence sur le traitement de la réforme par «24heures». Le quotidien présente notamment en exemples trois articles portant sur la réforme intitulés «La bataille est ouverte sur la révolution fiscale des firmes» (6 juin 2015), «Le PS menace de lancer un référendum» (2 avril 2015) et «Evitons les lendemains qui déchantent» (16 février 2015), exposant de manière équilibrée et proportionnée, selon «24heures», les différentes opinions. Le quotidien rejette ainsi les accusations de partialité et de propagande.
Enfin, quant à une éventuelle violation de l’article 3 de la «Déclaration» portant sur l’origine connue des informations, «24heures» rappelle que l’auteur responsable du supplément est mentionné dans l’encadré de la première page («Réalisé par l’Administration cantonale des impôts»), comme le fait habituellement le quotidien depuis plusieurs années. «24heures» rappelle également que l’impressum liste clairement les trois rédacteurs en charge de la publication et leur affiliation. De plus, pour le quotidien, l’éditorial ne représente qu’une mise en contexte de la réforme.
E. Le 4 août 2015, «24heures» demande par courrier la récusation de Michel Zendali, membre du Conseil suisse de la presse et auteur de la proposition d’autosaisie sur le supplément fiscal.
F. Le 18 août, la présidence du Conseil suisse de la presse accepte la demande de «24heures» concernant la récusation de Michel Zendali.
G. La présidence du Conseil suisse de la presse confie le cas à la 2ème chambre, qui en traite le 28 août 2015 ainsi que par voie de correspondance avec Dominique von Burg, président, Michel Bührer, Annik Dubied, Pascal Fleury, Anne Seydoux et Françoise Weilhammer, Michel Zendali étant récusé.
II. Considérants
1. En préambule, le Conseil suisse de la presse précise que l’autosaisie ne constitue pas formellement une plainte; dans ce cadre, le mail de Michel Zendali est à considérer non pas comme une plainte, mais comme une proposition détaillée d’autosaisie.
2. Pour le Conseil suisse de la presse, la question centrale consiste à savoir si, en publiant son supplément fiscal en l’état, «24heures» a contrevenu à l’obligation de distinguer le contenu rédactionnel de la publicité, comme le veut l’article 10 de la «Déclaration»: «S’interdire de confondre le métier de journaliste avec celui de publicitaire; n’accepter aucune consigne, directe ou indirecte, des annonceurs publicitaires». La communication des pouvoirs publics ne relevant à l’évidence pas du rédactionnel, le Conseil de la presse considère qu’elle doit être clairement distinguée du contenu rédactionnel lui-même. En l’occurrence, le journaliste est tenu à «[u]ne nette séparation entre la partie rédactionnelle, respectivement le programme, et la publicité. [Cette séparation] est impérative pour la crédibilité des médias. Les annonces et émissions publicitaires doivent se distinguer de façon claire et visible des contributions rédactionnelles» (directive 10.1).
Si «24 heures» a bien respecté les formes minimales exigées (le supplément fiscal est présenté, en première page à droite, comme «Réalisé par l’Administration cantonale des impôts»), le Conseil de la presse note toutefois que la confusion est induite à plusieurs niveaux. L’éditorial, signé par un personnage clairement identifié comme journaliste de premier plan par les lecteurs, induit une ambigüité sur la responsabilité éditoriale du supplément, d’autant qu’il est précédé en Une d’un dessin signé par l’un des deux caricaturistes habituels du journal, que les lecteurs sont également habitués à rencontrer dans la partie rédactionnelle du journal. Rédactionnel et publicitaire ne sont donc, à cet égard, pas clairement distingués, et les indices de responsabilité du contenu rédactionnel sont contradictoires, d’autant que l’impressum, s’il mentionne bien le nom des contributeurs de l’Etat, mentionne également le rédacteur en chef du journal comme rédacteur en chef du supplément.
3. La seconde question qui se pose selon le Conseil de la presse consiste à savoir si le supplément publié constitue une propagande illicite (directive 2.3: Distinction entre l’information et l’appréciation). Le supplément fiscal aurait-il dû contenir d’autres points de vues, autrement dit, y a-t-il «confusion entre information et propagande politique, aucun point de vue opposé à la réforme n’étant relayé» (mail de M. Zendali)? Le Conseil de la presse répond par la négative: dans sa pratique, il a régulièrement souligné qu’il était admissible qu’une information soit engagée et unilatérale, pour autant que l’existence d’autres points de vue soit également mentionnée. Et à cet égard, la défense de «24heures» (point D. des faits) est convaincante.
III. Conclusions
1. En publiant un supplément fiscal dans son édition des 14 et 15 mars 2015, «24heures» a généré une ambigüité entre contenu rédactionnel et publicitaire pouvant induire le lecteur en erreur. Il a donc contrevenu au chiffre 10 de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste» (distinction entre rédactionnel et publicitaire), et à la directive 10.1 (explicitation). La publication du supplément fiscal n’est pas problématique en soi, pour autant qu’il n’y ait aucune confusion possible sur la responsabilité rédactionnelle dudit supplément.
2. En publiant un supplément fiscal dans son édition des 13.-15.03.15, «24heures» n’a pas contrevenu aux chiffres 1 (recherche de la vérité), 2 (liberté d’information), 3 (traitement des sources) de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste», ni à la directive 2.3 (partialité / propagande).