Stellungnahme
Rechte eines Journalisten an einem unveröffentlichten Text Die „Erklärung der Pflichten und Rechte des Journalisten » wird verletzt, wenn eine Redaktion ein unveröffentlichtes Dossier eines freien Mitarbeiters ohne dessen Einwilligung an Betroffene weitergibt. Der Presserat befürwortet klare Regeln für die Zusammenarbeit zwischen Redaktionen und freien Mitarbeitern. Diese sollten mindestens vorsehen, dass freie Mitarbeiter vor einer allfälligen Überprüfung der in einem Artikel oder Dossier enthaltenen Information durch die Redaktion konsultiert werden. Prise de position Droit d’un journaliste sur un texte non publié proposé à une rédaction La „Déclaration des devoirs et des droits du journaliste » est violée lorsqu’une rédaction transmet à des tiers, sans l’accord de l’intéressé, un dossier confié par un collaborateur extérieur, qui n’a pas fait l’objet d’une publication. Le Conseil de la presse recommande qu’on établisse des règles claires à propos de relations entre rédactions et collaborateurs extérieurs. Ces règles devraient, au minimum, prévoir que le journaliste libre est consulté avant que la rédaction ne soumette à un contrôle les informations contenues dans un article ou un dossier. Presa di posizione Diritto del giornalista su un testo proposto e non pubblicato La „Dichiarazione dei doveri e dei diritti del giornalista » è violata se una redazione trasmette a terzi, senza l’accordo dell’interessato, l’inchiesta di un collaboratore esterno che ha deciso di non pubblicare. Il Consiglio della stampa raccomanda che regole chiare si stabiliscano tra redazioni e collaboratori esterni. Tali regole dovrebbero, come minimo, prevedere la consultazione del giornalista anche nel caso in cui la redazione desideri sottoporre a verifica le informazioni contenute nell’articolo o nell’inchiesta. |
I. En Fait
A. Dans le courant du mois d’août 1993, Maya Jurt, journaliste libre alors au bénéfice d’un accord de collaboration avec la rédaction de „Bilanz », a transmis à la rédaction en chef de „24 Heures » un document intitulé „dossier » et pourvu d’un embargo au 26 août. Il contenait diverses informations rassemblées au sujet des activités de l’ambassadeur de la Guinée équatoriale auprès des Nations Unies à Genève. Ces informations avaient, dans leur majorité, été utilisées dans un article rédigé pour „Bilanz », article dont la parution était prévue pour la date de l’embargo.
A une date non précisée, Jean-Philippe Jutzi, rédacteur en chef adjoint de „24 Heures », a transmis le dossier à la „Tribune de Genève », journal avec lequel 24 Heures a un accord rédactionnel impliquant notamment la mise en commun d’une majorité de la partie rédactionnelle des deux publications. Au début du mois d’octobre, Guy Mettan, rédacteur en chef de la „Tribune de Genève », a chargé l’un de ses collaborateurs, Jean-Noël Cuénod, d’enquêter sur les informations contenues dans le „dossier » de Maya Jurt, afin de déterminer si le sujet pourvait intéresser la „Tribune ». Maya Jurt n’a été informée d’aucun de ces développements.
Partant du principe que le „dossier » était une traduction française de l’article paru dans „Bilanz » et qu’il faisait désormais partie du domaine public, Jean-Noël Cuénod a fait sa propre enquête sur la base de ces informations. Au cours de cette enquête, il explique avoir eu connaissance de faits nouveaux concernant le conseiller de l’ambassadeur équato-guinéen. Ce dernier, contacté, lui ayant dit qu’il n’avait pas lu l’article de „Bilanz », il lui a transmis le „dossier »de Maya Jurt afin qu’il puisse se déterminer à son sujet.
B. Ayant appris par hasard ce qui précède, alors qu’elle n’avait jamais été officiellement approchée par la „Tribune », Maya Jurt demande au Conseil de la presse de se déterminer sur les points suivants:
– Qu’en est-il de la confidentialité d’un dossier soumis à une rédaction pour une publication éventuelle? – Cette rédaction a-t-elle le droit de transmettre le dossier à une autre rédaction avec laquelle elle a un accord de collaboration, sans demander l’autorisation de l’auteur du texte? – Quels sont les droits du journaliste face à un journal qui est en possession du texte sans que le journaliste ait donné son feu vert? – La „Tribune » a-t-elle le droit de transmettre le dossier à des tiers sans demander l’approbation de l’auteur? – A-t-elle le droit de faire ses propres recherches, en s’appuyant sur le texte reçu, sans se référer à l’auteur? – La „Tribune » s’est clairement servie du dossier pour prendre contact avec plusieurs personnes impliquées dans cette affaire. Peut-on demander des excuses – puisque ce procédé m’a valu des menaces de la part du conseilleur du président équato-guinéen – et des honoraires?
C. La présidence du Conseil de la presse a décidé d’entrer en matière sur cette affaire. Elle soulève des problèmes de principe qui sont particulièrement d’actualité, au moment où se multiplient les „synergies » intermédiatiques. Le cas a été confié à la 1ère Chambre du Conseil de la presse. Une délégation composée de Roger Blum et Sylvie Arsever a entendu, le 7 février 1994, Guy Mettan, Jean-Philippe Jutzi et Jean-Noël Cuénod.
II. Considérants
1. Les questions posées par Maya Jurt sont complexes et ne relèvent pas toutes de la compétence du Conseil de la presse. Ce dernier ne traitera donc que l’aspect de cette affaire qui touche à la déontologie journalistique, étant bien entendu que d’autres problèmes, concernant notamment le droit du travail, peuvent se poser également à son propos.
2. Maya Jurt estime que les documents confiés pour examen à „24 Heures » étaient confidentiels. Cette appréciation doit être nuancée: dans la mesure où les informations contenues dans cette documentation avaient déjà été publiées par „Bilanz », elles étaient devenues publiques et rien ne s’opposait en principe à ce que la „Tribune » fasse sa propre enquête, voire sa contre-enquête à leur sujet. Tel n’était en revanche pas le cas d’un nombre non négligeable d’informations encore inédites contenues dans le „dossier » soumis à „24 Heures ».
Le Conseil de la presse considère qu’une rédaction contrevient à la Déclaration des devoirs et des droits des journalistes lorsqu’elle utilise des informations non encore publiées qui lui ont été soumises par un journaliste libre pour faire sa propre enquête, sans obtenir au préalable l’accord de ce journaliste. Pour être en mesure de respecter ses propres obligations, telles qu’elles découlent notamment des chiffres 3 et 6 de la Déclaration des droits et devoirs des journalistes (donner une information complète et vérifiée et protéger ses sources), un journaliste libre doit en effet être assuré d’être consulté sur l’usage qui sera fait d’un projet d’article ou d’un dossier qu’il a soumis à une rédaction. L’obligation de consulter un journaliste libre avant l’utilisation d’un tel texte découle également du chiffre 4 de la Déclaration (interdiction du plagiat).
3. Ni „24 Heures » ni la „Tribune de Genève » ne contestent ce principe, que les deux publications disent respecter avec leurs collaborateurs extérieurs. Guy Mettan et Jean-Noël Cuénod disent avoir cru que le „dossier » remis par Maya Jurt recouvrait l’article de „Bilanz ». Seul Guy Mettan a vu ce dernier et un survol rapide des deux textes l’a conforté dans l’idée que le „dossier » était en fait une version française de l’article. Jean-Noël Cuénod, qui n’a vu que le „dossier », dit l’avoir toujours considéré comme la traduction française de l’article de „Bilanz ».
Une certaine confusion était possible sur la nature
de la documentation en cause. Intitulé „dossier », le texte remis par Maya Jurt à „24 Heures » était nettement plus long que l’article de „Bilanz ». Il commençait toutefois par un „lead » très semblable à celui introduisant ce dernier. Il était pourvu d’un embargo au 26 août, ce qui pouvait laisser penser qu’à partir de cette date, coïncidant avec la parution de „Bilanz », l’usage en était libre. En outre, les personnages dont Maya Jurt souhaitait garder l’anonymat y étaient déjà présentés sous un pseudonyme.
Tous ces éléments n’auraient certainement pas suffi à susciter l’erreur si l’affaire avait été traitée au sein de „24 Heures », publication avec laquelle Maya Jurt avait collaboré à plusieurs reprises et où elle disposait d’un contact régulier au sein de la rédaction.
4. Maya Jurt demande si la transmission du dossier à la „Tribune de Genève » sans son accord était licite. L’accord rédactionnel par lequel les deux publications mettent désormais en commun une partie importante de leur contenu rédactionnel est bien connu en Suisse romande. En proposant un article à „24 Heures », Maya Jurt savait que cet article pouvait, en cas de publication, paraître également dans les colonnes de la „Tribune de Genève ». Dans ces conditions, Jean-Philippe Jutzi pouvait penser que Maya Jurt n’était pas, a priori, opposée à une utilisation de son „dossier » par la „Tribune de Genève » et il n’a pas violé la déontologie en transmettant celui-ci à la rédaction de la „Tribune », dont il tenait pour acquis qu’elle contacterait Maya Jurt si elle était intéressée à une publication. En pratique toutefois, cette transmission a eu pour effet de créer une confusion qui a nui à Maya Jurt.
5. La „Tribune de Genève » n’a finalement rien publié sur la base du dossier de Maya Jurt. Au cas où une telle publication aurait été envisagée, il va de soi que Maya Jurt aurait dû être consultée auparavant et rémunérée. Ce point n’est pas contesté par la „Tribune de Genève » et ne mérite donc pas de développement particulier. Seule pourrait se poser la question de la rémunération, en cas de non publication, de la traduction de l’article de „Bilanz » (puisque le rédacteur en chef de la Tribune assure que tel était, selon lui, la nature du document transmis par Maya Jurt). Cette question échappe toutefois à la compétence du Conseil de la presse.
6. Le problème de la protection des sources ne se pose pas en l’espèce puisque le „dossier » de Maya Jurt utilisait un pseudonyme pour désigner les informateurs dont elle souhaitait sauvegarder l’anonymat.
III. Conclusions
1. Si le „dossier » de Maya Jurt avait recouvert exactement l’article de „Bilanz », rien ne s’opposait à ce que la „Tribune de Genève » procède à une enquête préalable à son sujet, sans consulter Maya Jurt. Un examen plus détaillé du „dossier » aurait certes permis de voir que tel n’était pas le cas. Le fait de n’avoir pas procédé à un tel examen ne peut toutefois pas être considéré, étant donné les similitudes entre les deux textes et les conditions de travail qui prévalent dans les rédactions, comme une faute en soi.
2. Même si subjectivement aucune faute ne peut être reprochée aux journalistes mis en cause, la „Tribune de Genève » a objectivement violé la Déclaration des devoirs et des droits des journalistes en utilisant le „dossier » de Maya Jurt sans son autorisation et en remettant une copie à certains protagonistes de l’affaire en cause. On peut penser que cette situation a été favorisée par le fait que le dossier n’a pas été directement remis à la „Tribune de Genève » par Maya Jurt mais qu’il est arrivé dans cette dernière rédaction en provenance de „24 Heures », sans précision sur l’état des négociations avec Maya Jurt.
3. Il est souhaitable que les rédactions, particulièrement celles liées par des accords de collaboration, établissent des règle claires concernant les collaborations extérieures et en informent systématiquement les journalistes libres avec lesquels elles sont amenées à traiter. Ces règles devraient prévoir au minimum que tout journaliste ayant proposé un texte ou un dossier en vue d’une publication est consulté si la rédaction souhaite procéder à des vérifications au sujet des informations proposées, la rédaction restant bien entendu libre, en cas de refus, de renoncer à toute publication. Le journaliste libre devrait également pouvoir donner son accord quant à la forme sous laquelle l’information sera publiée, le cas échéant.