I. En fait
A. Dans son édition de 19 h 30 du 10 février 2011, le téléjournal de la Télévision Suisse Romande (TSR) diffuse un dossier intitulé «Le grand format: enquête sur le projet de musée consacré à Chaplin». Selon les auteurs, Agathe Duparc et Marc Allgöwer, le projet est «aujourd’hui au point mort. Ses promoteurs peinent à trouver les 60 millions nécessaires, sans compter que selon nos informations, les propriétaires du manoir Chaplin ont des liens avec un homme d’affaires russe actuellement sous enquête en suisse.» Ce dernier serait «soupçonné de lien avec la Mafia». En mentionnant le nom complet le service continue: «En Suisse le Russe a acheté une superbe propriété, tout près du manoir de Charlie Chaplin. Problème: X. est interdit de séjour à Monaco pour ses liens présumés avec le crime organisé en Russie et en Suisse, il est sous enquête préliminaire de la police fédérale.» Selon les promoteurs du musée «le Russe ne finance pas le projet».
B. Le même jour, la TSR publie sur ses sites TSRinfo et TSRmobile un article signé Agathe Duparc et Marc Allgöwer sur le même sujet, intitulé «Des menaces pèsent sur le Musée Chaplin». L’article mentionne de nouveau le nom de X. «Surnommé ‹l’Antiquaire› ce Gréco-Russe a fait fortune dans le commerce d’antiquités et les activités portuaires à Saint-Pétersbourg, et conserve des liens avec des proches de Vladimir Poutine. (…) Comme le prouve un fax d’Interpol dont la TSR a reçu copie, il est interdit de séjour à Monaco pour ses liens présumés avec le crime organisé en Russie. Selon nos informations, il est également sous enquête préliminaire de la police fédérale helvétique. Or, coïncidence ou pas, X. vit depuis 2006 dans une somptueuse propriété à la Tour de Peilz entre Montreux et Vevey, à quelques kilomètres du Manoir Chaplin. Selon plusieurs sources (…) [des]rencontres ont eu lieu pour évoquer des projets d’investissement.»
C. Le 28 février 2011, par l’intermédiaire d’un avocat, X. saisit le médiateur de la Radio-Télévision Suisse Romande (RTSR). Selon le plaignant il n’est pas un personnage public et la TSR a porté gravement atteinte à sa personnalité «en violant sa sphère privée et en le diffamant à tout le moins à réitérées reprises». X. ne serait «ni de près ni de loin concerné par le projet du Musée Chaplin (…) les faits sont en ce qui le concerne largement faux et présentés de manière fallacieuse.» La rédaction TSR n’aurait pas vérifié les informations le concernant et n’est pas entré en contact avec lui avant la diffusion de l’enquête.
D. Le 15 avril 2011, X. s’adresse au Conseil suisse de la presse avec une plainte contre l’article publié sur TSRinfo et TSRmobile. De nouveau, il fait valoir que la TSR en publiant l’article incriminé a gravement porté atteinte à sa personnalité et a violé sa sphère privée «sans qu’aucun fait d’actualité ni aucun intérêt prépondérant privé ou public ne le justifie». Il n’est pas du tout concerné par le projet de Musée Chaplin. Il critique que le «même amalgane» a été utilisé dans le sujet «Le grand format: enquête sur le projet de musée consacré à Chaplin» diffusé par le téléjournal. De même le plaignant argue que l’article contient de fausses informations et que les auteurs ne l’ont pas auditionné avant de publier des reproches graves.
E. Selon l’art. 12 alinéa 1 du règlement du Conseil suisse la presse, la présidence traite les plaintes sur lesquelles le Conseil n’entre pas en matière.
F. La présidence du Conseil suisse de la presse, composée de Dominique von Burg (président), d’Esther Diener-Morscher (vice-présidente) et d’Edy Salmina (vice-président), a traité la présente prise de position le 3 juin 2011 par voie de correspondance.
II. Considérants
1. Selon l’art. 10 alinéa 2 de son règlement «le Conseil suisse de la presse peut entrer en matière sur des plaintes indépendamment du fait qu’une procédure du droit audiovisuel ou une procédure judiciaire ait été engagée en rapport avec l’objet de la plainte ou qu’une telle procédure soit envisagée par le plaignant/la plaignante, si des questions déontologiques fondamentales sont soulevées».
2. De l’avis du Conseil suisse de la presse cette condition n’est pas remplie en l’occurrence. Un traitement parallèle d’une plainte, par l’Autorité indépendante d’examen des plaintes en matière de radio-télévision (AIEP) est par exemple défendable si la plainte déposé au Conseil soulève des questions déontologiques qui se distinguent nettement de celles qui sont traitée dans la procédure de droit audiovisuel.
Même si la plainte au médiateur RTSR concerne une émission de la télévision et celle au Conseil suisse de la presse un article publié online, les deux plaintes se rapportent à des faits identiques et donnent lieu aux mêmes griefs du plaignant. Le Conseil suisse de la presse ne voit donc aucune nécessité de se prononcer sur ces mêmes faits en plus de la décision des autorités de surveillance des programmes audiovisuels. Vu que les plaintes sont identiques, le Conseil de la presse n’entre donc pas en matière.
III. Conclusions
L’entrée en matière est refusée.