Zusammenfassung
Der Schweizer Presserat weist die Beschwerde einer Autorin und Regisseurin ab. Ihr noch nicht aufgeführtes Theaterstück mit dem Titel «Les chutes d’Alep» war von GegnerInnen des syrischen Regimes als «Pro-Assad-Theaterstück» bezeichnet worden. Am 13. und 24. März 2021 schrieben die Tageszeitungen «24 heures», «Tribune de Genève» und «20 minutes» über den Disput. Sie berichteten ausserdem, der Lausanner Stadtpräsident habe Protestbriefe gegen die Subventionierung des Stücks erhalten. Die Autorin wurde zur Stellungnahme aufgefordert und wies den negationistischen Charakter des Stücks zurück. Sie verwies auf ihre gut dokumentierte Arbeit, die auf mehrjährigen Recherchen und Reisen basiere.
Nach Ansicht des Schweizer Presserats sind die zahlreichen in der Beschwerde vorgebrachten Vorwürfe unbegründet. Die Titel der jeweiligen Publikationen fassten den Sachverhalt zwar relativ rudimentär zusammen, enthielten aber keine falschen Informationen, und die dazugehörigen Untertitel lieferten die notwendigen Erklärungen. Die Diskussion über das Stück wurde ausreichend begründet dargestellt – die Artikel hatten nicht den Anspruch, die Geschichte des Syrienkonflikts im Detail zu analysieren. Auch die Medienmitteilung, in welcher die Absetzung des Stücks angekündigt wurde, ist nach Ansicht des Presserats nicht tendenziös interpretiert worden.
Was die Anhörung bei schwerwiegenden Vorwürfen betrifft, kommt der Rat zum Schluss, dass die Beschwerdeführerin mit den schwerwiegendsten Kritikpunkten konfrontiert worden sei. Ihre Antwort, die im Artikel wiedergegeben wurde, zeige, dass sie die verschiedenen Aspekte der Polemik richtig erfasst habe.
Résumé
Le Conseil suisse de la presse rejette la plainte d’une auteure et metteuse en scène dont le spectacle encore en préparation et intitulé «Les chutes d’Alep» était qualifié de «pièce de théâtre pro-Assad» par les opposants au régime syrien. Dans des articles publiés les 13 et 24 mars 2021, les quotidiens «24 heures», la «Tribune de Genève» et «20 minutes» font état de cette polémique et du fait que des courriers ont été adressés au syndic de Lausanne pour protester contre la subvention accordée à cette pièce. Invitée à réagir, l’auteure réfute le caractère négationniste du spectacle et évoque un travail documenté basé sur plusieurs années de recherches et de voyages.
Pour le Conseil suisse de la presse, les nombreux griefs invoqués dans la plainte sont infondés. Les titres, bien que résumant les choses de manière abrupte, ne contiennent pas d’informations erronées et les sous-titres donnent les explications nécessaires. La polémique autour de ce spectacle est présentée de manière suffisamment étayée, ces articles n’ayant pas pour ambition d’analyser en détail l’histoire du conflit syrien. Enfin, le communiqué de presse annonçant la déprogrammation de la pièce n’a pas été interprété de manière tendancieuse.
S’agissant de l’audition en cas de reproche grave, le Conseil est d’avis que la plaignante a été confrontée aux critiques les plus sérieuses. Sa réponse, reproduite dans l’article, démontre qu’elle a bien saisi les divers aspects de la polémique.
Riassunto
Il Consiglio svizzero della stampa respinge il reclamo di una regista e autrice. La sua opera teatrale, intitolata «Les chutes d’Alep» e non ancora rappresentata, era stata definita dagli oppositori del regime siriano «un’opera a favore di Assad». Il 13 e il 24 marzo 2021, i quotidiani «24 heures», «Tribune de Genève» e «20 minutes» si sono occupati della controversia, riferendo tra le altre cose che il sindaco di Losanna ha ricevuto lettere di protesta contro le sovvenzioni per l’allestimento dello spettacolo. L’autrice, a cui è stato chiesto di prendere posizione, ha respinto il carattere negazionista dell’opera, facendo riferimento al proprio lavoro come ben documentato e basato su diversi anni di ricerche e viaggi.
Secondo il Consiglio svizzero della stampa, le numerose accuse contenute nel reclamo sono infondate. I titoli delle rispettive pubblicazioni riassumevano invero le cose in modo approssimativo, ma non contenevano informazioni false, e i sottotitoli di accompagnamento fornivano le spiegazioni necessarie. La discussione sullo spettacolo è stata presentata in modo sufficientemente fondato, nonostante gli articoli non avessero la pretesa di analizzare nel dettaglio la storia del conflitto siriano. Infine, il comunicato stampa che annunciava la cancellazione dello spettacolo non è stato interpretato in modo tendenzioso.
Per quanto riguarda l’ascolto delle accuse gravi, il Consiglio ritiene che la reclamante sia stata messa di fronte alle critiche più gravi. La sua risposta, riprodotta nell’articolo, dimostra inoltre che ha colto correttamente i vari aspetti della polemica.
I. En fait
A. En date du 13 mars 2021 (la veille sur le site internet des quotidiens), «24 heures» et la «Tribune de Genève» (ainsi que deux médias alémaniques de TX Group SA) publient un article de Sylvain Besson intitulé «Vaud et Lausanne accusés de financer une pièce de théâtre pro-Assad». Celui-ci fait état de la polémique qui entoure «Les chutes d’Alep», une pièce en préparation taxée de «négationniste» par les opposants au régime syrien, et annonce que deux collectifs proches de ces milieux ont écrit au syndic de Lausanne pour protester contre la subvention de 90’000 francs accordée à ce spectacle. L’article évoque aussi la diffusion d’un podcast sur le site «The Swissbox Conversation» (rapidement retiré), qui aurait mis le feu aux poudres, podcast dans lequel l’auteure et metteuse en scène, Myriam Demierre, critique la vision du conflit donnée par les médias occidentaux et dit souhaiter rétablir l’équilibre. L’article cite enfin une «ébauche» de la pièce obtenue par une source confidentielle. Invitée à réagir, Myriam Demierre réfute le caractère négationniste de la pièce et évoque un travail documenté basé sur plusieurs années de recherches et de voyages.
Le même jour, «20 minutes», sous la plume de Frédéric Nejad Toulami, reprend et résume l’information dans un bref article publié sous le titre «Un spectacle pro-Assad subventionné crée un malaise». Il évoque une pièce qui donnerait surtout la parole à des Syriens favorables à Bachar al-Assad et qui dépeindrait les manifestants de la révolution de 2011 comme des personnes manipulées par des islamistes ou par des ONG financées par la Turquie et des pays du Golfe.
Le 24 mars 2021, «24 heures» et la «Tribune de Genève» publient un second article sur l’affaire, titré «Guerre en Syrie. Deux théâtres vaudois renoncent à une pièce jugée ‹pro-Assad›», qui évoque la déprogrammation du spectacle. Celui-ci reprend un communiqué, diffusé par l’Oriental à Vevey et le théâtre Benno Besson à Yverdon, qui annonce l’annulation d’un commun accord avec Myriam Demierre. La décision, précise l’article, s’explique par la pandémie, et surtout par la diffusion du podcast qui a suscité de virulentes réactions en raison des opinions exprimées par la metteuse en scène qui aurait ironisé sur le traitement réservé au conflit syrien par les médias occidentaux et remis en question les conclusions du rapport «César», lequel dévoilait les tortures infligées aux opposants.
B. Le 11 juin 2021, le Conseil suisse de la presse est saisi d’une plainte déposée par Myriam Demierre. Conformément à l’article 9a de son Règlement, le Conseil demande une correction.
C. Une nouvelle plainte est déposée le 15 octobre 2021. Celle-ci vise encore un nombre important de points et invoque les violations des directives 1.1 (recherche de la vérité), 2.3 (distinction entre l’information et les appréciations), 3.8 (audition lors de reproches graves) et 8.1 (respect de la dignité humaine). Myriam Demierre critique principalement une présentation orientée de sa pièce. S’agissant du premier article publié par «24 heures» et la «Tribune de Genève», elle déplore un titre et un chapeau qui font déjà passer le côté «pro-Assad» de son spectacle comme une réalité, un article qui procède par raccourcis et clichés ainsi qu’une volonté de sélectionner certaines citations de son ébauche pour conforter cette thèse au détriment de la recherche de la vérité. Pareil pour le montant de la bourse qui serait difficile à quantifier mais certainement pas supérieur aux 90’000 francs comme indiqué. Elle soutient également que le journaliste ne l’a pas confrontée à tous les reproches graves contenus dans cet article.
S’agissant de l’article de «20 minutes», Myriam Demierre reproche à son auteur d’avoir repris les «mêmes erreurs».
Enfin, la plaignante estime que l’article du 24 mars 2021 a déformé le communiqué de presse annonçant la déprogrammation du spectacle et réitéré tous les travers tendancieux du précédent.
D. Par courrier du 4 mai 2022, la présidence du Conseil suisse de la presse informe les trois médias visés qu’il fera usage de l’article 17, alinéa 2 de son Règlement pour se limiter aux motifs principaux de la plainte et traiter, dans le cas présent, du respect du chiffre 1 (recherche de la vérité) de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste» (ci-après: «Déclaration») et des directives 2.3 (distinction entre l’information et les appréciations) et 3.8 (audition lors de reproches graves). L’examen portera uniquement sur les publications romandes.
E. Les 12 et 13 septembre 2022, «24 heures» et la «Tribune de Genève» ont pris position par la voix de leur rédacteur en chef Claude Ansermoz et Frédéric Julliard. Ces derniers demandent principalement une non-entrée en matière en raison des menaces de procès formulées dans des courriers et, subsidiairement, un rejet de la plainte. Dans des réponses identiques, qui seront reprises plus en détail dans les considérants, ils estiment que les allégations sont infondées, que la polémique a été analysée sur la base des éléments à disposition, que le journaliste n’a pas substitué son appréciation personnelle aux faits et que la plaignante a bel et bien été confrontée aux reproches essentiels.
F. Le 12 septembre 2022, «20 minutes» prend position par la voix de son rédacteur en chef Philippe Favre et conteste l’intégralité de la plainte. Il soutient que son article s’appuie sur une source fiable et solide, démarche s’apparentant à la reprise d’une dépêche d’agence de presse et qui n’imposait dès lors pas de vérification. S’agissant du titre, il évoque un raccourci admissible, destiné à faire écho à la polémique et non pas à exprimer l’avis personnel du journaliste.
G. La présidence du Conseil de la presse confie le traitement de la plainte à sa 2e chambre, composée d’Annik Dubied (présidente), Sébastien Julan, Fati Mansour, Denis Masmejan et Anne-Frédérique Widmann. Joëlle Fabre se récuse. La récusation de David de Siebenthal a été demandée par la plaignante et refusée par la présidence.
H. La 2e Chambre du Conseil traite la plainte lors de ses séances des 10 novembre et 9 décembre 2022 ainsi que par voie de correspondance. David de Siebenthal est en partie présent.
II. Considérants
1. La Chambre décide d’entrer en matière sur la plainte. Aucune information concrète ne fait état d’autres plaintes ou procédures engagées contre les médias concernés.
2. a) Le chiffre 1 de la «Déclaration» impose au journaliste de rechercher la vérité. Le chiffre 2 de la «Déclaration», sous l’angle de sa directive 2.3, astreint le journaliste à rendre perceptible pour le public la distinction entre l’information proprement dite – soit l’énoncé des faits – et les appréciations relevant du commentaire ou de la critique. Ces deux principes étant étroitement liés dans la multitude de reproches formulés par la plaignante, laquelle dénonce des informations lacunaires et orientées, le Conseil les examinera ensemble à l’aune des points qui lui paraissent essentiels.
b) La plaignante s’en prend au titre du premier article de «24 heures» et la «Tribune de Genève», déplorant le fait que la mention «pro-Assad» ne soit pas mise entre guillemets, accréditant ainsi l’idée qu’il s’agit d’une réalité. Le Conseil a déjà eu l’occasion d’admettre qu’un titre, en raison des exigences de longueur, puisse amener à un raccourci pour autant que celui-ci ne contienne pas des informations erronées et que le sous-titre donne les explications nécessaires. En l’espèce, le titre «Vaud et Lausanne accusés de financer une pièce de théâtre pro-Assad» – bien que résumant les choses de manière abrupte – n’est pas faux, ni trompeur puisque c’est bien le sujet de la controverse. Des guillemets à «pro-Assad» n’auraient pas de sens dans une telle formulation. C’est bien le terme «accusés de» qui est ici central, qui met en cause les autorités et qui reflète le fait qu’il s’agit d’une polémique et non pas d’une réalité. Le titre ne viole donc pas le chiffre 1 de la «Déclaration», ni la directive 2.3 (distinction entre l’information et les appréciations), l’appréciation personnelle du journaliste n’entrant pas en considération.
c) Le sous-titre «Programmée dans quatre théâtres romands, ‹Les chutes d’Alep› présente la guerre civile syrienne sous un jour favorable au régime de Bachar al-Assad. Emoi et protestations» précise le contexte du sujet. L’utilisation de l’indicatif présent peut sembler plus problématique et un conditionnel («présenterait») aurait apporté une nuance bienvenue, mais la formule reste admissible eu égard aux éléments contenus dans l’article, lesquels confirment l’approche privilégiée par la pièce. Enfin, le lecteur comprend qu’il s’agit de la position des opposants syriens et non pas d’un commentaire du journaliste. La plainte doit donc aussi être rejetée sur ce point.
d) Toujours concernant le chiffre 1 de la «Déclaration» et la directive 2.3 (distinction entre l’information et les appréciations), la plaignante soutient essentiellement que c’est à tort que ce texte lui prête «un parti-pris» visant à donner la parole à des Syriens favorables au régime. Elle précise aussi que la pièce ne dit pas que les manifestants de la révolution de 2011 (mais celle de 2012) ont été largement manipulés par des islamistes.
S’agissant du premier reproche, le Conseil estime que l’auteur de l’article a suffisamment étayé ses affirmations en écoutant le podcast et en se procurant une ébauche de la pièce controversée, lesquels confirment ce parti-pris. La plaignante a d’ailleurs elle-même déclaré avoir délibérément choisi de ne pas interviewer des ex-rebelles, le but du spectacle étant de rétablir l’équilibre et de dénoncer le manque de déontologie des médias dans l’analyse de ce conflit. Dans le contexte d’une guerre civile, l’antagonisme des camps est forcément présent et ceux qui louent la stabilité et la prospérité du pays peuvent être perçus et qualifiés de pro-régime, même s’ils n’approuvent pas tous ses excès.
Quant à l’année où les islamistes sont entrés en scène, le Conseil relève que cette éventuelle imprécision est mineure s’agissant d’un article qui traite de la polémique autour d’une pièce de théâtre et qui n’a pas pour ambition d’analyser en détail le conflit syrien. Le Conseil fait aussi remarquer qu’une annexe produite par la plaignante, où elle présente son projet, fait référence (la phrase est soulignée) à une émission télévisée française où un spécialiste déclare que l’infiltration des groupes islamistes a commencé dès 2011 et que la théorie d’une opposition modérée a toujours été une fiction. Dans cette annexe, Myriam Demierre poursuit en écrivant que la plupart des civils aleppins (ou syriens) avec qui elle a pu échanger «rejoignent ces analyses, témoignent unanimement d’islamisme radical dès le début et dénoncent, pour la plupart, cette mauvaise couverture médiatique (…)». La plainte doit donc être rejetée sur ces deux points.
e) Sous l’angle de la directive 2.3 (distinction entre l’information et les appréciations) uniquement, et sans remettre en cause la véracité des propos, la plaignante reproche au journaliste de l’avoir décrite comme «une ancienne agente de voyages, devenue humoriste et réalisatrice de spectacles pour enfants», voulant ainsi jeter le discrédit sur sa personne en ne reprenant pas les mêmes termes que ceux utilisés par le jury de la bourse, à savoir «une metteure en scène, comédienne et auteure vaudoise», plutôt que de citer ses anciennes professions.
Le Conseil constate d’une part que les termes d’auteure et de metteuse en scène ont été utilisés tout au long de l’article pour qualifier la plaignante et rappelle, d’autre part, que la mission des journalistes est d’aller au-delà des communiqués officiels. Dans le contexte de cette polémique, il y avait un intérêt public à connaître le parcours de l’intéressée. Il ne s’agit pas d’une appréciation personnelle et il n’y a donc pas violation de la directive 2.3 (distinction entre l’information et les appréciations).
f) La plaignante reproche à l’article d’avoir affirmé qu’«au final, le soutien public à la pièce ‹Les chutes d’Alep› est plus élevé que les 90’000 francs de la bourse» alors que celui-ci serait même inférieur.
Le Conseil ne saurait la suivre sur cette voie. Le règlement officiel de cette bourse (au chapitre des conditions financières), mentionne la somme de 90’000, répartie sur deux saisons, et stipule que le canton de Vaud et la ville de Lausanne interviennent à part égale dans la constitution de ce montant. Le journaliste pouvait partir du principe que la bourse accordée en 2019 avait été intégralement versée en 2021 (ce que la plaignante ne conteste pas au demeurant) et que d’autres participations pouvaient encore augmenter le soutien à cette production.
Le tableau annexé par la plaignante mentionne d’ailleurs 170’000 francs de recettes au total (fonds publics et privés confondus). S’agissant de la part de co-production des théâtres de l’Oriental et Benno Besson (18’000 francs au total), mentionnée sans être chiffrée dans l’article, la plaignante reconnaît elle-même «qu’il est extrêmement compliqué de quantifier quelle part de ces montants provient effectivement de fonds publics».
Dans ces conditions, et vu que l’article se base aussi sur l’avis d’un directeur de théâtre romand, on ne peut reprocher au journaliste d’avoir enfreint le chiffre 1 de la «Déclaration», même si des imprécisions demeurent, les documents officiels pouvant prêter à confusion.
g) S’agissant de l’article du 24 mars 2021 paru dans «24 heures» et la «Tribune de Genève», la plaignante reprend ses reproches antérieurs sur la méconnaissance de la situation syrienne (déjà traités supra) et ajoute celui d’une interprétation tendancieuse et «loin de la vérité» du communiqué de presse annonçant la déprogrammation du spectacle. A ce propos, elle critique trois affirmations. «‹Les chutes d’Alep›» est déprogrammée après les propos de sa metteuse en scène.» «Une décision justifiée surtout par les opinions de Myriam Demierre sur le conflit syrien.» «Ce sont ces propos qui conduisent aujourd’hui à l’annulation de la pièce.»
La plaignante omet de mentionner que cet article précise que la décision est également justifiée par le coronavirus et que le journaliste reproduit l’essentiel du communiqué tout en soulignant que celui-ci ne dit rien de la pièce elle-même mais évoque surtout les propos tenus dans le podcast. A ce titre, le Conseil estime que l’article ne dénature en rien le communiqué de presse et mentionne également le passage expliquant que les violentes réactions suscitées par ce podcast ont «gravement détérioré les conditions de travail des artistes et le contexte médiatique de ce projet» et qu’il devenait «quasi impossible d’imaginer présenter sereinement des représentations de ce spectacle». Il n’y a donc aucune entorse au chiffre 1 (vérité), ni à la directive 2.3 (distinction entre l’information et les appréciations).
h) La plainte reproche à l’article de «20 minutes» d’avoir reproduit les mêmes travers en reprenant tel quel les articles examinés plus haut. Contrairement à ce que soutient «20 minutes», le Conseil estime que sa jurisprudence (prises de position 3/1992 et 41/2019), qui n’impose pas de contrôle lors de la reprise d’une dépêche d’agence, à la reprise d’articles d’autres médias, ne s’applique pas ici.
Cela étant, les griefs s’agissant du chiffre 1 et de la directive 2.3 (distinction entre l’information et les appréciations) peuvent également être rejetés pour les mêmes motifs développés plus haut. Le titre et le sous-titre résument une polémique que le corps du texte permet de mieux saisir et ne sont pas trompeurs dans la mesure où cette pièce vise bien à donner un éclairage différent et donc, dans un contexte de conflit, peut effectivement être perçue comme favorable au régime. Quant à la mention erronée d’une programmation à Lausanne, celle-ci ne prête guère à conséquence et a été corrigée depuis lors.
3. La plaignante estime aussi que le premier article de «24 heures» et la «Tribune de Genève» contrevient au chiffre 3 de la «Déclaration» sous l’angle de sa directive 3.8, laquelle prévoit que «les journalistes ont pour devoir d’entendre avant publication une personne faisant l’objet de reproches graves» et doivent décrire avec précision les reproches qu’ils comptent publier. Myriam Demierre précise que le journaliste s’est contenté d’évoquer la lettre ouverte des opposants syriens, l’empêchant ainsi de livrer son point de vue sur tous les détails relatés.
Le Conseil constate que cette lettre ouverte fait état du reproche le plus grave consistant à accuser le spectacle de négationnisme des crimes commis par un régime sanguinaire et à falsifier l’histoire. On peut donc partir du principe que le journaliste a effectivement confronté la plaignante aux critiques les plus sérieuses, même si tous les détails n’ont pas été abordés lors de leur conversation, détails qui ne répondent d’ailleurs pas forcément à la définition de «reproche grave».
La réponse de Myriam Demierre, envoyée par courriel et reproduite dans l’article, démontre que cette dernière a bien saisi les enjeux de la polémique puisqu’elle conteste l’aspect négationniste et s’exprime sur sa connaissance du terrain et sur la thématique de sa pièce. La directive 3.8 (audition lors de reproches graves) a donc été respectée.
Même si les articles traitent de cette polémique en donnant clairement l’impression d’accorder plus de crédit au camp des opposants, ceux-ci respectent dans leur ensemble les devoirs qui découlent de l’obligation de rechercher la vérité (chiffre 1), de distinguer l’information des appréciations (chiffre 2) et d’entendre la personne qui fait l’objet d’un reproche grave (chiffre 3 de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste»).
III. Conclusions
1. La plainte est rejetée.
2. En publiant les articles «Vaud et Lausanne accusés de financer une pièce de théâtre pro-Assad» le 13 mars 2021 et «Guerre en Syrie. Deux théâtres vaudois renoncent à une pièce jugée ‹pro-Assad›» le 24 mars 2021, «24 heures» et la «Tribune de Genève» n’ont violé ni le chiffre 1 (vérité) ni le chiffre 2 (distinction entre l’information et les appréciations) ni le chiffre 3 (audition lors de reproches graves) de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste».
3. La même chose vaut pour l’article «Un spectacle pro-Assad subventionné crée un malaise» publié par «20 minutes» le 13 mars 2021.