Zusammenfassung
Radio Télévision Suisse (RTS) berichtete in der Sendung «Mise au Point» über Zigarettenhersteller Philip Morris. Philip Morris Switzerland (PMS) reicht dagegen Beschwerde ein und warf RTS vor, im Beitrag sei aus einem internen strategischen Dokument zitiert worden. PMS habe zwar in einem Interview Stellung nehmen können, sei aber vorgängig nicht darüber informiert worden, dass RTS im Besitz dieses Papiers sei. Philip Morris hatte vor der Ausstrahlung des Beitrags die Entfernung der entsprechenden Sequenz gefordert. RTS übertönte in der Folge die Aussagen des Sprechers mit einem Piepton, begleitet von einer Off-Stimme, die erklärte, dass Philip Morris die Entfernung dieser Sequenz gefordert habe und das «vertrauliche Dokument nicht kommentieren» wolle. Philipp Morris monierte, RTS habe sie in eine Falle gelockt und sich nicht fair verhalten.
Der Presserat hält fest, dass RTS das interne Strategiepapier zwar nicht vor der Interviewaufnahme an Philip Morris weitergeleitet, dessen Kommunikationsverantwortlichen jedoch vor dem Interview sehr wohl auf den Gegenstand des Gesprächs hingewiesen hatte (rund 40 E-Mails waren ausgetauscht worden). Zudem war der Inhalt des Dokuments – also die Unternehmensstrategie – eindeutig Teil des vereinbarten Interviews.
Was die Forderung des Unternehmens betrifft, das besagte Zitat zu entfernen, hält der Presserat fest, dass das Vorgehen von RTS korrekt war, indem sie es nicht gelöscht, aber mit einem Piepton unverständlich gemacht haben.
Der Journalistenkodex gesteht Journalisten das Recht zu, «die Aussagen ihrer Gesprächspartner zu überarbeiten und zu kürzen, sofern der Sinn dieser Aussagen dadurch nicht verändert wird». Zumal ein Journalist im Falle einer wesentlichen Änderung des Inhalts auf Wunsch des Interviewten (in diesem Fall die Streichung eines Teils) berechtigt ist, diese Intervention transparent zu machen. Der Presserat hat die Beschwerde von Philip Morris abgewiesen.
Résumé
Le Conseil de la presse a rejeté la plainte déposée par Philip Morris Switzerland (PMS) contre l’émission «Mise au Point» de la Radio Télévision Suisse (RTS). Philip Morris reproche à la RTS d’avoir, lors d’une interview enregistrée avec son porte-parole, évoqué un document stratégique interne en sa possession sans que son porte-parole en ait été averti au préalable. Elle lui reproche ensuite, alors que Philip Morris avait exigé (et obtenu) le retrait de la séquence ayant trait au document, d’avoir simplement couvert les propos de son porte-parole par un bip sonore accompagné d’une voix off expliquant au téléspectateur que Philip Morris avait exigé la suppression de la séquence et ne souhaitait pas «commenter ce document confidentiel». Philip Morris fait valoir d’avoir été piégé et soutient que la RTS ne s’est pas comporté de manière loyale sur ces deux points.
Le Conseil de la presse note que, si la RTS n’a pas transmis le document stratégique interne problématique au porte-parole avant l’interview filmée, elle avait bien averti son interlocuteur de l’objet de l’entretien en amont de l’interview (une quarantaine de mails échangés) et que l’objet de ce document, la stratégie d’entreprise, faisait clairement partie de l’entretien convenu. Pour ce qui est de la couverture par un bip sonore des propos du porte-parole de Philip Morris, le Conseil de la presse constate que la RTS respecte son engagement envers l’entreprise de supprimer la citation à sa demande. La «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste» reconnait aux journalistes le droit de «retravailler et raccourcir les déclarations de leurs interlocuteurs, pour autant que le sens de ces déclarations ne s‘en trouve pas changé»; d’autant qu’en cas de changement substantiel du contenu de l’interview à la demande de l’interviewé (en l’occurrence, suppression d’une partie), le journaliste est autorisé à «rendre transparente cette intervention».
En conclusion, le Conseil de la presse rejette la plainte.
Riassunto
Il Consiglio della stampa ha respinto il reclamo presentato da Philip Morris Switzerland (PMS) nei confronti del programma «Mise au Point» di Radio Télévision Suisse (RTS). PMS ha accusato la RTS di aver citato, nel corso di un’intervista registrata con il suo portavoce, un documento strategico interno in possesso del media romando senza che il portavoce ne fosse stato previamente informato. Ha inoltre biasimato il fatto che nonostante PMS avesse richiesto (e ottenuto) l’eliminazione della sequenza relativa al documento, RTS avesse semplicemente coperto le osservazioni del portavoce con un segnale acustico accompagnato da una voce fuori campo che spiegava agli spettatori che Philip Morris aveva chiesto la rimozione della sequenza e non desiderava «commentare questo documento riservato». PMS ha affermato di essere stata raggirata e ha sostenuto che la RTS non ha agito con correttezza al riguardo.
Il Consiglio della stampa ha osservato che sebbene prima dell’intervista la RTS non avesse informato del documento strategico interno il portavoce di PMS, lo aveva comunque avvertito in anticipo sullo scopo dell’intervista (erano stati scambiati una quarantina di e-mail) e che l’argomento del documento, la strategia aziendale, faceva chiaramente parte dell’intervista concordata. Quanto alla richiesta della società di rimuovere la citazione, il Consiglio della stampa osserva che la RTS ha rispettato l’impegno rendendola incomprensibile mediante un segnale acustico. La «Dichiarazione dei doveri e dei diritti del giornalista» accorda ai giornalisti il diritto di «rielaborare e abbreviare le dichiarazioni dei loro interlocutori, a condizione che il significato di tali dichiarazioni non venga modificato», in particolare perché in caso di rettifica sostanziale del contenuto dell’intervista su richiesta dell’intervistato (in questo caso la cancellazione di una parte), il giornalista è autorizzato a «rendere trasparente tale intervento». Il Consiglio della stampa respinge dunque il reclamo.
I. En fait
A. Le 7 novembre 2021, l’émission «Mise au Point» de la RTS (Radio Télévision Suisse) diffuse une enquête «L’IQOS: un écran de fumée?», signée par le journaliste François Ruchti. Dans ce sujet, le journaliste s’intéresse au produit IQOS de l’entreprise Philip Morris, à son impact réel sur la santé, aux données qu’il récolte ainsi qu’à la stratégie de l’entreprise à son égard.
B. Le 4 février 2022, Philip Morris Switzerland (ci-dessous PMS) dépose plainte auprès du Conseil suisse de la presse, arguant que «Mise au Point» et François Ruchti ont enfreint les chiffres 3 (sources) et 4 (méthodes déloyales) de la «Déclaration des devoirs et des droits du / de la journaliste» (ci-après «Déclaration»), ainsi que les directives 3.8 (audition lors de reproches graves) et 4.6 (entretien aux fins d’enquête).
PMS reproche d’abord à «Mise au Point» d’avoir, lors d’une interview enregistrée avec son porte-parole, évoqué un document stratégique interne en sa possession sans que son interlocuteur (le porte-parole Tommaso Di Giovanni) en ait été averti au préalable. PMS, dès le lendemain, a exigé le retrait de la séquence ayant trait au document en question. La RTS a obtempéré, et, au montage, la réponse du porte-parole est couverte par un bip sonore, et une voix off explique que PMS en a demandé la suppression et ne souhaite pas «commenter ce document confidentiel». PMS a le sentiment d’avoir été piégé et soutient que «Mise au Point» a violé la directive 3.8 en ne retranscrivant pas ses propos de «manière loyale», ainsi que la directive 4.6, en étant déloyal dans sa conduite de l’entretien, arguant que:
– Si son porte-parole avait été mis au courant de la mention de ce document avant l’entretien, PMS aurait pu vérifier son authenticité, déterminer qui l’avait écrit et quand, en «apprécier le contexte», et s’exprimer en toute connaissance de cause.
– La RTS a été déloyale en prétendant avoir accepté de supprimer ladite séquence alors qu’en la gardant ainsi censurée d’un bip sonore avec une voix off, ce procédé ne «vise en effet qu’à une seule chose: attirer l’attention des téléspectateurs sur le document en cause, le contraire de ce que PMS avait demandé» tout en laissant entendre que PMS refuse de commenter publiquement sa stratégie.
PMS se plaint également du fait qu’à un autre moment, le reportage mentionne «un courrier de Philip Morris» adressé au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) pour «supprimer leurs recherches sur l’IQOS». C’est selon elle une accusation grave selon laquelle «PMS cherche à museler les scientifiques». PMS reproche à la RTS de ne pas l’avoir laissée s’exprimer sur ce courrier et défendre son point de vue: «PMS n’aurait pas manqué de revenir sur le contexte et le contenu de ce courrier et aurait pu clairement expliquer pourquoi cette accusation était infondée».
C. Le 2 juin 2022 la RTS, par la voix de son service juridique, prend position, et demande le rejet intégral de la plainte. Le défendeur estime que le chiffre 3 (respectivement la directive 3.8) n’a pas été violé, PMS ayant accepté l’entretien aux fins d’enquête et étant au courant des thématiques qui seraient abordées d’une part, et le journaliste n’étant pas tenu de présenter toutes ses sources et sa documentation lors d’une interview, d’autre part. Elle estime également que le chiffre 4 (respectivement directive 4.6) n’a pas été violé, indiquant que «Contrairement à ce qu’a indiqué le plaignant, il n’a pas été convenu que la partie de l’interview traitant du document ne sera pas diffusée. ‹Mise au Point› a indiqué que la citation du porte-parole serait supprimée. Le bip sonore a été mis en place afin de ne pas entendre les propos du porte-parole. La voix-off permet d’informer le spectateur en toute transparence». Pour ce qui est du courrier adressé au CHUV, la RTS précise que cette « affaire » était déjà sortie en 2017 dans divers médias, et que, comme il n’y a pas d’éléments nouveaux, le journaliste a repris les arguments de PMS communiqués à l’époque, qui sont mentionnés en résumé en voix off.
D. La 2ème Chambre, composée de Annik Dubied (Présidente), David de Siebenthal, Joëlle Fabre, Sébastien Julan, Fati Mansour et Denis Masmejan, a traité de la plainte lors de sa séance du 30 juin 2022 ainsi que par voie de correspondance. Anne-Frédérique Widmann s’est récusée.
II. Considérants
1. La directive 3.8 (audition lors de reproches graves) prévoit que «les journalistes ont pour devoir d’entendre avant publication une personne faisant l’objet de reproches graves». En la matière, le Conseil de la presse note que, si «Mise au Point» n’a pas transmis le document stratégique interne problématique au porte-parole avant l’interview filmée, elle avait bien averti son interlocuteur de l’objet de l’entretien en amont de l’interview (nombreux mails échangés). Le plaignant reconnaît d’ailleurs lui-même que «Les directives ne consacrent pas un droit à la remise au préalable de documents sur lesquels un média veut faire porter une interview». Reste donc, aux yeux du Conseil, la question de la stratégie d’entreprise, qui n’aurait pas été évoquée explicitement (au contraire de l’injonction «décrire avec précision les reproches graves qu’ils comptent publier») par F. Ruchti comme objet de l’entretien d’enquête.
Le Conseil de la presse note à ce propos que le mail adressé le 21/10/21 par François Ruchti à PMS et joint au dossier était particulièrement détaillé: «Nous allons utiliser les questions techniques déjà mentionnées. De plus, nous souhaitons aborder: Quelle est la stratégie de PMI avec IQOS? / Quelle est la stratégie d’un mode sans fumée? / Pourquoi ne pas arrêter complètement le business du tabac? / Quels sont les avantages de IQOS pour PMI? / Que signifie la stratégie de ‹normalisation› avec l’IQOS? Nous avons également une série de questions en lien avec les critiques formulées par les ONG anti-tabac: Quelle est la dangerosité de l’IQOS? / L’OMS et des études récentes contredisent les informations de PMI. Votre réaction? / Est-ce que vos publicités sont tronquées sur les risques? / L’industrie du tabac est très critiquée et elle a un déficit de crédibilité. Comment allez-vous faire pour convaincre les ONG et la population?»
De surcroît, l’interview portait explicitement sur le nouveau produit-phare de l’entreprise Philip Morris, l’IQOS, décrit par exemple sur son site internet publicitaire comme «une meilleure alternative à la cigarette avec moins d’odeur, sans fumée ni cendre. Ce sont nos produits qui nous distinguent, puisqu’ils ne brûlent pas le tabac», ou comme «IQOS: 5 ans de progrès [vers] Un avenir sans fumée» sur le site internet de l’entreprise. Il est dès lors clair, pour le Conseil de la presse, au regard du mail précité comme de la publicité du produit mentionnée, que la stratégie d’entreprise fait partie de l’objet de l’entretien.
Quant à la mention du courrier adressé au CHUV à propos d’une étude scientifique indépendante lausannoise de 2017, et accusant PMS de tenter de «réduire au silence des scientifiques», le Conseil a régulièrement rappelé le principe qui veut que le média rende compte de la réponse qui est faite aux reproches graves (voir par ex. 10/2008). En l’occurrence, il prend note du fait que PMS s’était déjà défendue précédemment, y compris auprès de la RTS sur ce sujet; «Mise au Point» donne bien, dans son reportage, un résumé de la position de PMS de l’époque. Dans le cas d’espèce, ce compte-rendu est certes succinct, mais clair, et la directive 3.8, justement, rappelle qu’il n’y a «pas d’obligation de donner à la partie touchée par des reproches graves la même place, en termes quantitatifs, qu’à la critique la concernant».
En conséquence, le Conseil de la presse constate que «Mise au Point» et François Ruchti, en annonçant l’objet de leur entretien filmé avec le porte-parole de PMS en amont de celui-ci, ou en reproduisant les arguments énoncés précédemment par PMS, ont bien décrit «avec précision les reproches graves qu’ils compt[ai]ent publier», d’une part, et ont d’autre part entendu «avant publication [l’entreprise] faisant l’objet de reproches graves». Le chiffre 3 de la «Déclaration» n’est donc pas violé.
2. En ce qui concerne le chiffre 4 de la «Déclaration» et la directive 4.6 (entretien aux fins d’enquête) invoqués par le plaignant, le Conseil de la presse constate qu’en couvrant d’un bip sonore les propos du porte-parole de PMS, «Mise au Point» respecte son engagement envers l’entreprise de supprimer la citation du porte-parole à sa demande. La directive invoquée reconnait par contre aux journalistes le droit de «retravailler et raccourcir les déclarations de leurs interlocuteurs, pour autant que le sens de ces déclarations ne s’en trouve pas changé». En outre, en cas de changement substantiel du contenu de l’interview à la demande de l’interviewé (en l’occurrence, suppression d’une partie), le journaliste est autorisé à «rendre transparente cette intervention» (directive 4.5 non-mentionnée par le plaignant) – ce que fait le bip. En conséquence de quoi le Conseil de la presse constate que «Mise au Point» et François Ruchti n’ont pas violé le chiffre 4 de la «Déclaration» (respectivement la directive 4.6).
III. Conclusions
1. La plainte est rejetée.
2. En diffusant son reportage «L’IQOS: un écran de fumée?», la RTS n’a pas transgressé les chiffres 3 (audition en cas de reproche grave) et 4 (entretien aux fins d’enquête) de la «Déclaration des devoirs et des droits du / de la journaliste».